D'un pas assuré, Athalie se rendait à la bibliothèque - vieille excuse pour échapper à sa camarade de chambre un peu trop chiante sur les bords.
Quelques livres dans les mains, tous prit au hasard, elle avançait dans les couloirs, couloirs qu'elle venait d'empreinter, avant d'accélerer brusquement, comme si elle venait de croiser une connaissance indésirée.
Mais elle s'obligeait seulement à ne pas regarder les murs.
Comme autrefois.
Quoique, autrefois, elle prenait du temps, tout au contraire, à les observer.

Elle avait beau avoir retrouvé ses points de repère, ses habitudes et ses soucis plus banales que l'année dernière, elle n'oubliait justement pas, cette année là. Elle avait arrêté d'avoir peur de tout le monde, d'avoir peur de tout, tout simplement, et elle parlait à son entourage sans craindre que de stupides rumeurs circulent à son sujet. Mais les principaux éléments s'étaient évaporés pour qu'il puisse y en avoir.

*Ne regarde pas, ne regarde pas, ne regarde pas...*

Evidemment, elle tourna la tête et se mit à regarder.
Ce mur, si significatif. Était-ce le côté gauche ou droit ? Elle observait les deux, tour à tour.
Ce couloir où tant de choses s'étaient produits. Ici. Alors elle passa son chemin, en baissant la tête tout en se promettant de ne plus passer par ici. C'était trop de souvenirs déchirant, et même s'ils n'étaient pas forcément heureux, combien de fois elle avait rêvé de revenir une année plus tôt, avant tout ça ? Avant ces départs. Leur départ.

- Tu devais être une amie pitoyable pour qu'ils te laissent seule.

Après quelques secondes d'incompréhension, elle se rendit compte que ce n'était pas elle qui avait parlé. Ni même ses pensées. Cette voix provenait de derrière.
Juste là...

Elle se retourna d'un même mouvement, un peu trop brutalement pour qu'elle puisse faire semblant de s'en ficher. Ces paroles, qu'elle avait comprit au moment où elles avaient été prononcées.

- Sherry.

Celle-ci eut un rire un peu trop affirmatif, comme si elle ne pouvait pas se tromper sur la personne. Parce qu'elle se croyait unique.

- D'abord ta meilleure amie...

*Si tu parles de...*

De qui, hein ?
Cette peste ne l'avait jamais apprécié. Elle non plus d'ailleurs, mais la différence était qu'elle, n'avait jamais profiter de chaque occasion qui se présentait à elle pour la rabaisser aux yeux de tous.
Pauvre petite chose...
Et tous ces moments qu'elle avait essayé d'oublier. Elle ne le pourrait jamais, n'est-ce pas ? Ce n'était qu'une illusion. Comme avant. Et cette simple idée la rendit presque heureuse, si bien qu'une moitié de sourire vint contourner ses lèvres. Tout n'était qu'une illusion.

- Puis ton copain...

Naissance de sourire qui disparut aussitôt.

*Mon...*

- Ce n'était pas mon copain., s'empressa t-elle de réfuter rien qu'à cette idée.

- Qu'est-ce que tu dis ? Grimace blasée d'un semblant de bourgeoisie.

- Jake n'était pas mon copain, répéta t-elle.

Et ce prénom qu'elle avait tant prononcé. Auquel elle avait tant pensé.
La cheerleader diabolique eut un rire de sorcière maléfique et Athalie ne sut même pas quoi répondre à ça. Une garce de plus, c'était tout ce qu'elle était. Une espèce de copie conforme de McMillan en verte et argent.
Celle-ci se contenta de tourner les talons, après un bruyant soupir hautain.

- Ca, c'est ce que tu crois.

Elle tourna à l'angle et disparut comme une fumée.
Athalie mit quelque seconde à se rendre compte que c'était réel. Qu'elle aussi... Et qu'elle-même tout autant. Ce refrain ne cesserait jamais. Si les autres ne l'avait pas encore fait, alors elle, ne pourrait jamais oublier.

Et si cette fille n'était que le reflet de ses pensées, finalement ? De ses pensées refoulées, toutes ces choses qu'elle reniait, qu'elle mettait de côté, qu'elle refusait d'avouer.

Les livres qu'elle tenaient dans les mains finirent par se cogner contre le mur, et elle ne comprit pas immédiatement que c'était elle, qui venait de les lancer.

*J'ai ligoté les deux sorcières... de la maison en psychotropes... quand je m'en vais tu m'enveloppes...*

Quelques fois, elle voyait des élèves passer sans vraiment les voir. Après avoir remarqué les livres éparpillés par terre, elle n'avait plus bouger, ni même ciller, comme hypnotisée par le mur d'en face... qui était aussi banale que tous les autres. Mais lorsqu'une personne venait s'interposer entre votre point de vue et votre personne, il était impossible de ne pas la remarquer. N'est-ce pas ? Surtout quand cette personne vous tendez l'un de vos livre sous le nez.

- C'est à toi ?

*C'te question...*

C'était à elle qu'il parlait, elle le savait bien. Mais si son cerveau refusait de lui indiquer tout mouvement approprié à faire en cette situation, c'était pareillement pour son corps. Comme récupérer le livre à l'aide d'une main et dire merci, par exemple.

Sauf que, quand on vous balançait le livre, quelque chose en vous réagissait machinalement. Un réflexe plutôt utile qui vous empêchait de vous bouffer la chose en pleine face. Bon, c'était un peu plus bas que la tête, mais ça revenait au même. Ou presque.

- Uh, fut le seul son perceptible qui s'échappa de ses lèvres lorsqu'elle réceptionna le bouquin en le serrant sur sa poitrine.

Il ne maitrisait pas sa force, apparemment. Sympa d'attendre la réponse.
Elle baissa la tête afin de relooker le bouquin qu'il venait de lui jeter tout en laissant échapper :

- Nan.

...machinalement.
Et ses yeux se levèrent lentement vers l'individu qui se tenait en face d'elle. Grand : c'était le mot pour le qualifier. Soit elle était très petite, soit il était très grand. Selon elle, c'était la deuxième option, mais un mixte des deux était fort probable. Elle le dévisagea durant quelques longues secondes, le temps de mettre un nom sur la personne. Puis elle cligna des yeux plusieurs fois, signe que son cerveau se remettait doucement mais sûrement en marche, puis fronça les sourcils en hochant négativement la tête. Dou-ce-ment.

- Nan, répéta t-elle d'une façon un tantinet plus audible pour qu'il puisse entendre sa réponse. On aurait dit qu'elle n'était pas certaine de ce qu'elle affirmait. Comme si elle posait une question... Nan ?

Gryffondor. 7ème année. Gardien de son équipe de Quidditch, lui qui avait pas mal de fois fournit quelques complications à son équipe, à elle. Alors, il n'était pas son ami ? Devon.
Elle sourit, mais pas à lui. Plutôt à elle-même, une façon de remercier ses pensées de lui fournir ces quelques informations.

Et son sourire s'effaça aussi vite qu'il était apparu, laissant peu de temps au jeune homme pour le percevoir. Elle jeta un coup d'œil aux autres livres qui n'avaient pas bougé, encore allongés sur le sol, d'un regard un peu vide, puis se contenta de tendre brusquement les deux bras afin d'applatir le fameux livre sur le torse du Gryffondor cette fois. Il n'avait qu'à pas se tenir aussi prêt d'elle.

- T'as qu'à le garder, proposa t-elle simplement sur un ton un peu trop neutre qui ne faisait pas bon ménage avec son geste précédant.

Pourtant, il n'était sûrement pas dupe. Alors à quoi bon lui mentir ? Mais c'était si facile.
De mentir.

Tout comme c'était simple de ressortir les vieilles armes de guerre et de le toiser d'un regard interrogateur et quelque peu hautain, seulement pour lui donner raison.
Parce qu'il était à Gryffondor... Et elle à Serpentard...
La bonne excuse.

*Appelle moi, mais pour des prunes... J'épèle lune en quatre pas... Belle était toi qui me déplume...*

A peine le livre bloqué sur le torse du jeune homme que celui-ci s'en empara une seconde fois, et probablement pas pour le lire :

- Sans façons, je n'ai d'amour pour ce genre de trucs.

*Ca tombe bien, moi non plus.*

- Je te le rend en espérant qu'il t'instruira, Duchâteau.

Okay, c'était quoi cette manie de l'appeler par son nom de famille ? "Athalie" - seulement trois syllabes pourtant - était donc si compliqué à prononcé ou c'était pour le seul amour de lui montrer qu'il ne l'appréciait guère ? Mais à le voir ainsi, elle pouvait facilement en déduire qu'il ne devait pas apprécier grand monde. Lui-même ne plaisait peut-être pas à tout le monde.
Enfin, au moins, il connaissait son nom.

Et puis, autant le dire, elle était certaine qu'elle était tout aussi instruite - voir plus - que lui. Une autre habitude qu'avait prit toutes ces personnes à se faire une fausse image d'elle. Mais finalement, elle s'en fichait tout autant que le reste.

Trop occupée à se montrer têtue envers lui en ne le quittant pas des yeux, elle n'eut pas le temps de s'apercevoir que le Gryffondor s'apprêtait à lâcher le livre à ses pieds, qui eux-mêmes firent d'ailleurs un rapide bond en arrière afin que le bouquin n'atterisse pas en plein dessus.

*Pauvre type.*

C'était peut-être trop demandé d'être à peu près sympa avec elle ? Ca ne changeait pas vraiment des ex-habitudes, après tout, et elle avait apprit à passer outre.
Et elle avait beau ne pas faire de grands efforts de son côté, elle reportait l'entière faute sur le rouge et or.

Celui-ci prit d'ailleurs bien vite le chemin inverse, n'ayant pas l'air d'apprécier à sa juste valeur l'excellente compagnie qu'était celle des verts et argents, tournant les talons d'un air un peu trop fier pour être naturel.

Et alors qu'elle ramassait le livre que le jeune homme venait expressément de faire tomber, elle haussa un sourcil perplexe lorsqu'elle vit que ce Devon apparaissait encore et toujours dans son champs de vision.
Livres en mains, elle fit quelques pas en avant tout en fronçant les sourcils. Soit il se payait sa tête, soit on venait de lui jeter un oubliette sans qu'elle ne s'en rende compte et il ne savait plus où il souhaitait aller. Elle penchait pour la première solution qui était plus logique.
Et surtout plus probable.

- Tu veux peut-être le plan de l'école ? venait-elle de lancer d'une voix ennuyée.

Soupir.
Ce mec là, il était presque aussi étrange que...
...lui.

A toujours lui chercher des noises... Et bien évidemment, elle ne mit pas bien longtemps à faire le rapprochement et à créer un lien inexistant.
Aussi saugrenu que cela puisse paraître, Athalie se surpris à se tourner peut-être une dernière fois vers Devon, le dévisageant cette fois-ci, d'une toute autre manière.

- Non, merci. Je ne préfère pas me fier à toi, quitte à me perdre dans le dédale de couloirs de cette maudite école.

*C'est ça...*

Elle priait intérieurement pour qu'il se perde réellement celui là, et qu'il atterrisse dans un coin paumé de Poudlard. Il y en avait tellement...
Le rouge et or finit par tourner les talons - pour la seconde fois - sous le regard d'Athalie qui le suivait encore des yeux. Celui-ci fouilla dans sa poche avant d'en sortir un objet qu'elle n'identifia pas immédiatement. Puis un son familier répondit à son ultime question, suivit d'une odeur plus ou moins dérangeante qui ne lui laissait plus aucun doute. Elle pesta contre lui, soupirant bruyamment afin de montrer son mécontentement alors qu'il ne l'entendait même plus. Elle finit par faire la même chose que lui ; non pas aspirer l'une de ces fumée non-identifiée et la ressortir par le nez, mais s'en aller dans le sens inverse du Gryffondor, c'est-à-dire en direction de sa salle commune. Livres en mains, elle entreprit de continuer sa route, mais étonnamment - et magie ou pas, elle n'avait jamais vu ça - l'un des livre semblait avoir sa propre vie et réfléchir par lui-même, puisqu'elle le sentit bouger entre ses mains. Comme si il ne se passait pas assez de choses étranges dans cette foutue école, il fallait que les livres se mettent à vivre, eux aussi. Et alors qu'elle décidait simplement d'ouvrir le bouquin en question, histoire de découvrir ce qu'il voulait, une chose énorme en sortit, manquant de lui sauter en plein visage. Un hurlement sonore résonna dans les couloirs et elle ne remarqua même pas que c'était d'elle qu'il provenait. Les livres, posés dans ses mains seulement quelques secondes avant cela, atterrirent une fois de plus sur le sol. L'affreuse chose semblait courir dans tous les sens et telle une demeurée, Athalie en fit autant, pensant tout bonnement que ce truc allait la bouffer. Elle ne pensa même pas à sortir sa baguette tant la bête la répugnait.
...Et elle s'arrêta de courir seulement lorsqu'elle faillit buter contre Devon... qui tenait le machin entre ses mains. Elle baissa la tête, fronçant les sourcils, ne comprenant absolument pas comment la bestiole avait pu sauter aussi vite sans qu'elle le voit...
Elle chassa le dernier livre, qui semblait presque l'avoir suivit, d'un coup de pied et se remit à son observation.

- Bouffe-tout ?

*Ne me dis pas que cette chose à un nom..?*

Athalie resta tout bonnement éberluée devant le gryffy qui persistait à parler au... rat. Car oui, cette bestiole ressemblait bel et bien à ce type de rongeur, maintenant qu'elle pouvait mieux l'observer. Un rat avait 10 kg de plus dans le ventre. Et elle avait beau être blonde, si ce machin avait un nom et que Devon le surnommait ainsi, elle en déduisit qu'il lui appartenait.
Le rouge et or possédait un rat domestique pour animal de compagnie.

- Qu'est-ce que tu fous là, Duchâteau ?

*Oh toi, ça va, hein.*

- Depuis quand tu as été intégré chez les Gryffondor car, au cas où tu ne serrais pas au courant, ce couloir mène à la salle commune des Gryffondor.

*T'en fais pas, je squatterais votre salle commune pour rien au monde.*

C'était fou, face à lui, la guerre Serpentard/Gryffondor semblait renaître de ses cendres.

- Qui de nous deux aurait besoin d'une carte, hein ?

*Ah ah ah, mais c'est qu'il aurait presque de l'humour ?*

Reprenant ses esprits bien rapidement, elle soupira doucement, dévisageant tour à tour Devon, puis son rongeur avec dégout. Le rouge et or semblait s'impatienter, tapant du pied, clope à la bouche, ne respirant rien d'autre que de la fumée. Elle aurait voulu la lui faire bouffer, sa cigarette. Et qu'il s'étouffe avec. A la place, elle se contenta de tirer l'objet de ses convoitises avec une main et de la laisser tomber par terre, l'écrasant de sa chaussure, tout comme elle aurait voulu le faire avec son rat.

- C'est mal de fumer.

*D'avoir un rat aussi, remarque...*

Elle ignorait si elle avait expressément utiliser les mêmes mots qu'avec lui, mais elle s'en fichait. Que pouvait-elle dire d'autre ?
Et alors que le remix de la souris semblait la narguer, elle lança un regard bref et hautain au jeune homme qui le maintenait, avant de tourner définitivement (ou pas !) les talons.

Mais c'était plus fort qu'elle...
...N'est-ce pas ?

Elle s'arrêta après seulement quelques millièmes de secondes de marche et profita du moment où Devon sembla se rendre compte qu'elle ne reviendrait pas, c'est-à-dire se retourner enfin. Attrapant sa baguette magique qui se trouvait à un endroit dont elle seule avait accès. (Non, je ne vous dirai pas lequel.) Sans même se retourner, elle se contenta d'incliner la tête et de cibler son regard sur l'insecte géant, lançant un "Fraprat" inaudible. Le rat en question se détacha de l'emprise que son maître avait sur lui et fut propulsé un peu plus loin, glissant - ou roulant, qu'importait - sur le sol, comme une pauvre bête.

Un sourire victorieux vint orner ses lèvres et elle continua sa route, comme si de rien n'était.

Elle était loin d'être naïve. Bon, peut-être un peu, mais pas à ce point ! Elle n'était pas dupe et se doutait parfaitement que le rouge et or n'allait pas se laisser faire aussi facilement. Les hommes et leur égo... N'empêche qu'elle s'était attaqué à son rat, pas à lui. Mais apparemment, il avait prit ce geste pour une insulte personnelle. Il fallait s'en douter.
Et peut-être que c'était ce qu'elle attendait, finalement. Mais elle avait beau se douter qu'il répliquerait, elle n'imaginait pas qu'il serait aussi vive dans ses réflexes. A moins qu'il soit en colère au point de ne plus réfléchir à ce qu'il faisait..? Qu'importait. Elle n'eut même pas le temps de comprendre ce qu'il se passait qu'elle se retrouvait par terre, bien plus proche du sol que du plafond. Force de gravitation, quand tu nous tiens...

*Fait chier.*

C'était crade par terre.

- VAS TE FAIRE FOUTRE.

*Putain.*

Et elle restait au sol, comme trop blasée pour se relever. Soupir. Elle avait le chic pour se mettre dans la merde. Ca n'avait pas l'air d'avoir changé, finalement. A croire qu'elle aimait ça. Tombée dans des situations de ce genre, c'était son truc, pas vrai ? Il lui fallait peut-être sa dose d'adrénaline pour vivre. Ou peut-être que non.

- Ça, c'était pour ma cigarette.

*J'hallucine, il s'en est toujours pas remis ?*

Lui était vite passé à autre chose, au moins...
Et dire qu'elle faisait ça pour son bien être ! Il se bousillait la santé, elle ne faisait que lui rendre service ! Bon okay, c'était surtout pour l'énerver.
N'empêche...
Enfin, ça n'avait pas eu l'air d'avoir servi à grand chose, sachant qu'il avait encore un de ses mégot dans la bouche.

- Et ça...

*Et merde.*

C'était reparti pour un tour. Franchement deux sortilèges d'affilés, c'était pas du jeu. Elle préférait ne pas commenter le fait qu'il s'en prenne à une fille, sachant qu'elle avait horreur qu'on l'épargne à cause de ça. Toujours était-il que c'était dans ces moments là qu'on découvrait le genre d'hommes qu'ils étaient...
Ni une, ni deux, ce fut comme un coup brutal dans le ventre... qui la propulsa tout le long du couloir. Elle glissait un peu comme le rat précédemment, et elle s'en voulut pour cette comparaison.

- C'est pour Bouffe-tout.

Apparemment, la créature avait une place importante dans le cœur du Gryffondor. C'était peut-être son seul ami... Etrangement, elle n'en éprouva aucune peine, ni même de la pitié. Cette pensée ne fit que l'amuser. Voyant qu'il s'approchait dangereusement d'elle, elle fronça les sourcils, concentrant toute son énergie dans son regard, afin que celui-ci soit le plus froid et méprisant possible.

- Regarde dans quel état tu te mets pour un bout de papier et un ventre sur pattes.

Dit comme ça, c'était clair que c'était pathétique. C'est fou ce qu'il était susceptible ce garçon... Etrange aussi, certes, mais susceptible.
Quand il eut enfin finit sa route, il se retrouva debout, face à elle, habillé de manière différente.
Quelques traits dessinés sur ses bras lui sautèrent immédiatement aux yeux et elle ne put s'empêcher de les fixer avec insistance. C'était comme s'il tenait à Le lui faire rappeler. Toutes ces comparaisons, toutes ces ressemblances... Tout était destiné à ne pas L'oublier. C'était fait exprès, hein ? Mais peut-être qu'elle était la seule à voir toutes ces concordances. Peut-être qu'elle voulait les voir.

*Tu nous fais quoi, là ?*

Chassant ces brèves idées d'un léger mouvement de tête comme pour reprendre ses esprits, elle considéra le couloir avec interrogation, remarquant le haut l'uniforme aux couleurs rouges et ors, ainsi que sa cape éparpillé sur le sol. Haussant un sourcil suspicieux, elle le toisa un moment.

- T'es en chaleur, ou quoi ?

Un sourire malicieux fit son apparition sur ses lèvres et elle se contentait de l'observer, amusée.
Reprenant son sérieux, elle décida de l'enfoncer un peu plus.

- Compte pas sur moi pour t'aider de ce côté là...

Coup d'œil furtif vers le principal concerné rempli de sous entendu, suivit d'un bref haussement d'épaule. Elle avait beau être à terre, elle gardait le contrôle.
Juste le temps de l'étonner par ses paroles quelque peu audacieuses pour attraper sa baguette, le désarmer et se relever pour le pousser brusquement - ou pas - vers le sol (ce, sans baguette, héhé).
Les rôles s'inversaient et elle y prenait un plaisir fou.

- Orchideus.

Le bouquet qui apparut dans sa main était énorme et elle fut surprise de sa maîtrise.
Retrouvant un regard sombre et désagréable, elle le jeta tout bonnement sur Devon, comme pour s'en débarrasser, tandis que chaque pétale s'éparpillait sur lui et le sol.
Simple et pure provocation qui avait pour seul but de l'énerver un peu plus. Le plaisir pur variait en fonction de chaque personne, n'est-ce pas ?
Baguette pointée en sa direction, appuyant avec insistance sous son menton.

- Et maintenant c'est qui la fille, hein ?

Les fleurs, c'était seulement pour le côté théâtrale de la chose...

- T'en vaux même pas la peine. Comme Lui.

Son sourire s'estompa aussi vite qu'il était apparut. Ses yeux se vidèrent de toute lueur qui avait pu les abriter quelques instants auparavant. Ses bras s'étaient abaissés - presque machinalement - faisant ainsi tomber la menace qu'était sa baguette sur lui. Son souffle restait régulier alors qu'elle s'étouffait de l'intérieur. Elle le fixait de ses grands yeux verts, interdite.

Elle ne perçut même pas les gestes qu'il fit. La seule chose qui la fit revenir à la réalité fut cette fumée grisâtre qu'elle sentit souffler sur son pâle visage et qui la déconnecta de toutes pensées.

Elle se sentit comme horriblement humiliée par ce garçon qu'elle ne connaissait même pas. Qu'elle n'avait jamais prit la peine de connaître, en fait. Ce même garçon qui osait la juger sans même comprendre.

- Pour ton information, je n'ai pas besoin de toi pour me soulager de ce coté là, comme tu dis. Je n'ai pas besoin de courir après quelqu'un pathétiquement pour pouvoir assouvir mes désirs. Après, tu peux jeter ton dévolu sur moi si tu veux, mais je ne suivrais pas ton mouvement.

Elle déglutit avec peine, comme si c'était les paroles du Gryffondor qui avait du mal à passer.
Elle avait eu l'habitude de ces moments-là ; toutes ces provocations, ces défis, et ces menaces, qui finissaient la plupart du temps par une ivresse d'émotions fortes, et qui entrainait ainsi ce trouble et cette excitation mélangée. Mais ce n'était pas lui. Ce n'était pas avec lui qu'elle jouait à ce jeu. Il n'avait aucun droit sur elle, elle ne lui avait pas permit. Pas encore. Il avait certains points communs avec Lui, elle ne pouvait le nier. Mais il n'était pas Lui. Il n'avait rien à voir avec Lui, au diable ses ressemblances.

Le brun lui avait jeté un regard qui aurait pu la faire frémir si elle n'avait pas fermé les yeux. Elle se battait mentalement contre lui, contre celui qu'il était, contre l'emprise qu'il avait sur elle. Paupières closes, elle luttait contre elle-même.

*Regarde le.*

Elle ne cligna pas d'un cil.
La seule chose qu'elle pouvait voir d'ici n'était autre que la noirceur de son obscurité.

*Regarde toi...*

Aujourd'hui, elle allait briser les règles. Elle ouvrit les yeux.

Il n'avait pas bougé. Il était resté là, à attendre, devant elle. Pourquoi ? Il l'observait, la fixait, de ses yeux sombres et dédaigneux qu'étaient les siens. Mais elle, demeurait impartiale. La dernière chose qu'elle souhaitait était qu'il sache, qu'il lise en elle. Mais c'était impossible, pas vrai ? Lui, avait toujours dit qu'elle était profondément inconsciente et imprévisible. L'était-elle encore, après Son départ..?

Alors elle avança, tel un automate, d'une démarche lente et pourtant si peu sûre d'elle. Elle ne glissait pas sur le sol, elle luttait à chaque pas - comme si elle portait un poids sur ses frêles épaules - lui rappelant qu'elle n'avait pas le droit de faire ça.

Mais qui donc pouvait se permettre de lui donner des ordres..? Qui osait les lui donner..?
Elle avait apprit depuis longtemps à ne faire confiance qu'à elle-même, à ne plus souffrir du regard des autres, à ne plus avoir peur de rien, de quiconque, et surtout pas d'elle-même : à ne plus regretter ses actes.
...Parce que le regret était pour les faibles, n'est-ce pas ?

Elle était proche. Trop proche de lui, maintenant. Mais c'était trop tard pour reculer, elle le savait. Elle ne croyait plus en rien. Les miracles n'existaient pas, elle l'avait comprit, ça aussi. Il fallait tout faire soi-même pour que le destin daigne se pointer au bon moment.

Sa proximité la faisait se sentir... Se sentir, tout simplement. Pourquoi être quelqu'un, quand on pouvait seulement être ? Elle savait que c'était mal, mais elle comptait justement là dessus pour ne pas se laisser faire. Prendre les devants, ou suivre au pas.
Ecraser... Ou se faire écraser.
C'était bien pour ça ? Pour quoi, au juste ? Etait-ce sa manière à elle, de L'oublier ? De Le remplacer ? Ou n'était-ce que son simple désir qu'elle se devait d'assouvir ?

Elle effleura à peine ses lèvres, toujours un peu hésitante, puis, dans un élan passionné qui n'était pas le sien, elle captura ses lèvres pour un chaste baiser. Etait-ce une manière plus ou moins appropriée de signer la fin de cette guerre plus que douteuse ? Elle l'ignorait. Elle ne savait même plus qui elle embrassait.

Et quand elle se détacha enfin de ce lien qu'elle venait de créer avec lui, elle ne sut pas exactement ce qu'elle voulait, aujourd'hui.
Non, elle savait seulement ce qu'elle ne voulait pas.

- Ne me rejette pas, avait-elle précipitamment lâché dans un souffle.
Ces quatre mots sonnaient presque comme une supplication. Elle refusait qu'il la laisse seule. Qu'il la laisse partir. Qu'il la laisse, tout court. Elle en valait la peine, il fallait qu'elle le lui prouve, ou sinon...
Ses yeux trahissaient la crainte d'être abandonnée - une fois de plus - par ce garçon, qu'elle ne connaissait même pas.

*Ne l'a-t-il pas déjà fait ?*

Pas encore. Non. Pas lui. Il n'était pas comme l'Autre.
Alors d'où venait ce brusque changement d'humeur ? Ce caractère lunatique que seul Lui faisait habituellement ressurgir plus que de raison ?

- S'il te plaît...

*Déteste moi, aies pitié de moi, mais....*

- ...ne me rejette pas...